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Le Figaro : "Au domaine de Terrebrune, de vieux rosés miraculeux, des rouges sublimes et désormais un mystérieux "Vin de France""
Domaine mythique de Bandol, Terrebrune va sortir «Terreblonde», une cuvée en appellation Vin de France destinée à une consommation plus décomplexée.
Reynald Delille et Jean d’Arthuys, copropriétaires du domaine de Terrebrune. Brice Portolano
Lorsque l’on aborde le rond-point de l’échangeur d’Ollioules-Sanary-sur-Mer, avec vue sur autoroute et entrepôts, il y a de quoi douter du GPS. Même les plus optimistes douteraient qu’un petit paradis se trouve à sept minutes de là (selon Waze). Et pourtant, il suffit d’emprunter les chemins de traverse et de prendre la tangente pour retrouver Reynald Delille, copropriétaire avec Jean d’Arthuys du domaine de Terrebrune, légende bandolaise sise sur le calcaire du Trias. Un terroir et un emplacement saisissant de beauté, d’où l’on embrasse assez vite le caractère unique des vins et d’où l’on s’émerveille d’une vue magistrale sur la Méditerranée.
Qui apprécie Bandol ne peut ignorer Terrebrune, cette propriété transmise de père en fils, exemptée depuis toujours de la moindre chimie. Georges Delille avait posé les bases dans les années 1960, avec la structuration du vignoble, puis la création de la cave dans la décennie suivante, pour enfin vinifier et mettre en bouteille. La notoriété du domaine suivra. Son style aura su convaincre sans mal les amateurs, parisiens d’abord, puis du monde entier, grâce à ces vins à la structure déliée, cette finesse de trait si caractéristique et si particulière dans ces contrées sudistes. Tout comme la transmission père-fils, les flacons traversent allègrement les années. En témoignent ces rouges dégustés au domaine par une fraîche journée d’hiver. 1991 d’abord, au nez magique de cèdre et de pin maritime, au toucher de bouche sensationnel, puis le 1985 à la magnifique salinité.
Un «Terreblonde» plus accessible en prix
Si les dégustateurs de tout bord classent Terrebrune parmi l’élite provençale, le premier amoureux des vins du domaine reste Reynald Delille lui-même. À le voir porter un verre à ses lèvres, malgré sa soixantaine, il reprend soudain des airs d’adolescent exalté par ses premiers émois. «Mes vins sont liés à mon incompétence», glisse-t-il dans un sourire. Il se reprend, plus solennel : «Ce sont des vins droits dans leur terroir». Surviennent, du fond de la cave, les rosés. 2019 est à mettre entre les mains et les palais de tous les fâchés du rosé, traumatisés à coups d’arômes patauds de bonbon anglais et d’agrumes de synthèse. Ici, tout l’inverse. Et enfin 2008, plus de quinze ans de cave et pourtant : un nez attendrissant de vieux champagne, infiniment complexe, brioché, toasté...
Ces vins incitent au constat que Terrebrune se fait attendre et se sirote à un âge respectable. Malgré tout, les jus de 2024 dégustés sur fût se présentent comme un authentique pousse-au-crime. Pour pallier notre impatience patentée, Reynald nous apprend que bientôt, Terrebrune aura son Vin de France, autrement dit une cuvée déclassée car pas dans les clous de l’appellation Bandol, qui exige un élevage de 18 mois pour les rouges. Une pratique adoptée par de plus en plus de vignerons en quête de liberté dans leurs vinifications. Les vignes jugées trop âgées pour le rosé – entre 5 et 20 ans – seront exploitées pour élaborer cette cuvée baptisée... Terreblonde. Par opposition à la terre brunie des plus vieilles vignes, celle-ci est blonde. «Nous voulions présenter un vin plus accessible», décrit Reynald Delille. Il le sera aussi par son prix et aucun amateur ne s’en plaindra. Sortie prévue au printemps.
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Par Martin Lemaire
Publié le 7 janvier